Solitude et communion (du 14 septembre au 27 novembre 2006)

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8 sujets de 31 à 38 (sur un total de 38)
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  • #1707
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      Cet écrit devait normalement se positionner avant:
      « Croire en l’amour, en la gratuité, tout cela est très difficile. »
      J’espère que cette fois ci, il s’inscrira dans le forum.

      « Le vide peut être une page blanche ou le lieu d’une rencontre à naître, que je vais remplir de vie ou de presque rien, voir rien, si je reste superficiel(le).
      Il y a aussi le vide « non sens » qui anéantit, c’est un lieu de mort effrayant effectivement. S’effrayer de la mort et du néant, c’est peut-être réagir avec notre sur-nature, notre cœur, qui vit pour un sens et pour créer, pour donner et recevoir, accueillir… Signe de profonde santé et de « clairvoyance » à coup sûr !
      Notre monde semble être fait de nécessité. Et cette nécessité pèse aussi sur les hommes et rend l’amour conditionnel. La peur de disparaître et l’obligation de survie rend l’humain, au fur et à mesure qu’il prend de l’âge et des « claques », inhumain !
      Je tue avant d’être tué(e), je dévore pour ne pas être dévoré, je domine pour ne pas être assujetti(e), je me méfie, je me bats pour subsister, c’est toute la loi de la nature, pour laquelle nous ne sommes pas faits en réalité… Dans ce cadre, l’amour est conditionnel, comment pourrait-il ne pas l’être !
      La gratuité n’est pas du monde, elle est du Ciel. La gratuité est Révélation… Elle est un don de Dieu ! La désirer c’est lui ouvrir tout grand sa porte. Peu à peu elle emménage dans notre vie et la transforme. Patience !
      La nudité = désastre positif… Excellent ! Cela me fait penser au Baptême par immersion pour signifier la mort à la vie mortelle pour la vie en Christ. C’est vrai que cela a un coût, le coût de ma vie jusque là, mais j’en témoigne ça vaut le coup !
      « Adorer Dieu en Esprit et en Vérité » c’est l’aimer tel qu’Il est, pas seulement dans sa gloire mais aussi sur la croix. C’est Lui rester fidèle par amour, gratuitement dans la joie comme dans le malheur, c’est chercher son regard, sa lumière, sa chaleur, son cœur, et c’est l’accueillir… C’est témoigner que l’Amour est plus fort que tout, qu’Il ressuscite, qu’Il crée, et qu’un jour Il règnera totalement enfin !

      Par: Michelle Foucault, le 16.11.06

      #1708
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        À Didier,
        L’expérience sans doute la plus fondamentale de l’athée est la solitude. Une solitude ressentie comme un isolement. Dieu, alors lui apparaît comme « froid et distant » et l’Église forcément absente, puisqu’elle parle de Dieu. Même si elle ne cesse de dire que Dieu est chaud (amour) et plus proche que je le suis de moi-même. Le bouddhisme alors peut correspondre à la situation existentielle de l’athée : s’en tirer tout seul. Le vide dont il parle a une analogie avec l’expérience existentielle du vide. L’expérience du vide est peut-être salutaire car le vide est insupportable. La nature a horreur du vide. Le vide peut mettre en route d’une manière très simple : chercher à s’en sortir et à sortir du vide et de la solitude. Et Jésus dit à ceux-là : « Qui cherche, trouve ». Car Dieu n’attend que cela pour se manifester. Celui qui se trouve au désert est dans les meilleures conditions pour trouver ce Dieu qui se penche sur le cœur blessé. Dieu ne peut passer à travers un cœur blindé. Il faut une faille. Un Dieu qui dérange n’est d’ailleurs pas si mal. Un Dieu qui ne supprime pas toujours la souffrance, c’est plus difficile à comprendre. Dieu donne le sens et, de cette façon, il supprime la souffrance la plus profonde. Mais il ne supprime pas tout ce qui se passe sur la terre, Jésus en a fait l’expérience. Mais uni à lui, la souffrance devient enfantement d’un monde meilleur, le craquement d’une éclosion. L’enfermement dans la Religion est possible, mais Dieu s’arrange pour que les constructions humaines s’effondrent. L’homme nu sur la Croix colle à Jésus. Etty Hillesum voyait dans les camps d’extermination que la vie était plus forte et Kübler-Ross que la joie planait étrangement sur la mort. Sans aller jusque-là, celui qui souffre et qui prie fait l’expérience qu’il n’est pas seul, qu’il est soutenu et que finalement il peut rendre grâce, car l’épreuve l’a enrichi. Cette connaissance est liée à l’expérience comme la fleur qui ne peut fleurir qu’au terme du processus vital. Dieu est la vie.

        Par: P. Marie-Joseph, le 20.11.2006

        #1709
        Webmaster
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          À Michelle, la blessure existentielle

          Je suis d’accord avec cette idée de la blessure existentielle. C’est une fêlure me traversant à la base. C’est un manque. La force du Taoïsme, du Bouddhisme et de la psychologie est que ces disciplines sont basées sur cette blessure. Cette blessure devient le centre de leur discours. Elle est assimilée, intégrée et transformée en centre de la vision du monde. De très grands penseurs et même des génies ont effectué cette opération. Je les salue respectueusement.
          Ce qui me fait refuser d’embrasser complètement ces grandes idées sont les faits que j’existe, que le monde existe et que ce monde est plein d’humains. Ils sont là. Dans ce sens, je rends adoration à Dieu. Il est présent. Il me reconnaît. Il m’accepte. Il est celui qui est. Sa présence est reconnaissance de ma personne. Sa présence affirme mon existence. Pour une telle présence, il est concevable de soulever des montagnes. Hic.
          Les montagnes sont en moi et autour de moi. Elles sont en moi. Je suis réticent à aller vers mon prochain. Je ressens face à lui indécision, peur, angoisse, malaise. Je le ressens imprévisible, violent, fermé, m’excluant. Un roman illustre ce point. Des personnages décrits commettent le meurtre, le mensonge, la dissimulation, la manipulation « pour la bonne cause ». Ce comportement est jugé désagréable mais nécessaire. Les personnages commettant ces horreurs sont incapables de dire pour quelles causes ils se battent. Ils sont incapables de savoir si ce qu’ils font a de la valeur. Ils le font pour rester des « professionnels ».
          Ce professionnalisme est une montagne autour de moi. Il implique de manipuler, de combattre, d’écraser et d’exclure pour rester dans la course. C’est une forme atténuée par rapport au roman, mais il existe. Une autre montagne est la nécessité absolue de montrer son bonheur, sa joie de vivre, son engagement dans la lutte de tous contre tous. Il est obligatoire d’être heureux dans ce genre d’histoires. C’est possible. Les conditions sont « faire semblant », « ne pas trop réfléchir », « vivre dans l’instant présent », «s’acheter un mode de vie », « faire de l’argent », « se droguer, baiser, boire », « manipuler, mentir sans pitié », « décréter que sa vision est la seule possible ». Ce n’est pas exhaustif. Mais cela revient à trouver un abri en soi où je pourrais me sentir moi-même et à jouer un jeu face à mon prochain. Je dois instrumentaliser l’autre. Il devient mon outil. C’est une définition de l’amitié, voire de l’amour. C’est aussi de la perversion pratique.

          Par: Didier, le 21.11.2006

          #1710
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            À Michelle, la blessure existentielle bis
            La publicité devient communication. L’instrumentalisation devient amitié. Le sentiment de toute puissance devient le moteur de la vie. L’argent devient la sanction de la réussite (par lui, avec lui et en lui). L’argent est la vie. C’est aussi le symbole du triomphe de la rationalité. Toutes les relations humaines deviennent mesurables par l’argent. Tout, absolument tout, a un prix. Les individus existent par l’argent qu’ils peuvent dépenser. Celui qui a de l’argent devient alors tout puissant. Il peut tout. Il peut aussi tout avoir tout de suite. Les vendeurs n’ont qu’à se débrouiller pour fournir ce que le possédant exige. Du coup le vendeur est flatté. Il est supposé pouvoir tout faire. Son sentiment de toute puissance va le motiver à accepter de faire n’importe quoi et va se sentir coupable s’il ne peut pas le faire. Ici non plus ce n’est pas exhaustif. Résoudre ce qui est décrit ici revient à comprendre le monde. C’est au – delà de mes moyens.
            Dieu, là dedans, avec l’amour du prochain, l’état de pécheur, les limites, la réalité, l’existence d’une transcendance gène, agace, embarasse, bloque. Il est donc logiquement rejeté. Il est de trop. Réciproquement, croire en Dieu est invalidant. Croire en Dieu, c’est m’exclure du monde. Tout ce que j’ai dit plus haut est inadmissible si je crois en Dieu. Croire en Dieu, c’est m’incarner devant mon prochain et exiger de lui qu’il s’incarne devant moi. Il ne peut pas se permettre d’être évanescent, fusionnel, faux et flou. Involontairement, je le force à être devant moi. Je dérange et méchamment. Je deviens une menace. Je deviens un extrémiste religieux. Je deviens un nazi. Je suis exclu.
            Je suis effrayé par mon prochain. J’effraie et je gêne mon prochain. Je suis exclu de la sphère du monde par nos sentiments réciproques. Dieu me mets hors du monde. Sans le monde, je suis hors de Dieu. Dieu me mets dans le monde. Le monde me mets hors de lui. Je tourne en rond. Je dois vivre. Je ne sais pas comment.

            Par: Didier, le 21.11.2006

            #1711
            Webmaster
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              À Michelle, le vide (bis)

              Le perdant n’a qu’à s’en prendre à lui-même. Il se sent coupable de perdre. Il est plus qu’humilié. Il est anéanti et honteux. Il est faillible. Un moyen d’éviter cette faillite est d’acheter. Actuellement, des vêtements ont beaucoup de succès car ils vendent un style de vie avec la marque. Acheter, car une belle voiture permet de cacher son échec personnel. Seule la voiture est visible. Seule la voiture compte.
              Le gagnant n’a pas besoin de Dieu. Le perdant a une place pour Lui. Mais croire en Dieu est un comportement de « loser ». Il peut s’acheter une illusion de succès et se cacher derrière. Chaque publicité montre que le produit machin rend heureux, grand, fort, etc… La drogue permet d’oublier la perte. Le gagnant n’a besoin de personne. Il s’est fait tout seul. Le perdant a besoin des autres. Mais ces autres l’ont blessé et gravement. Comment pourrait – il aller vers eux ? Comment pourrait – il oublier sa douleur ? Comment guérir quand chaque regard sur le monde rappelle la douleur ? Il est plus facile de se perdre dans les illusions et l’autodestruction. J’ai passé par là. Je connais ce chemin.
              J’ai trouvé en Dieu un appui et une force. J’ai trouvé en Dieu une présence et un guide. J’ai trouvé en Dieu une raison de vivre. Je me suis construit pas à pas (et pas tout seul). J’arrive à une certaine stabilité intérieure, à une certaine force face à la réalité. J’ai fait d’énormes progrès. J’ai alors regardé le monde et j’ai vu une contradiction entre Lui et le monde. Je ne sais pas du tout comment entrer dans le monde. Je ne sais pas comment y vivre. Je n’ai n’y envie de retourner à mon comportement de perdant, ni envie de payer le prix pour entrer dans le monde. Il comporte, entre autres, la nécessité de jeter Dieu. Je ne sais pas comment respecter ces deux conditions. Je suis en train d’essayer. Je ne suis pas du tout sûr d’y arriver.

              Par: Didier, le 21.11.2006

              #1712
              Webmaster
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                À Michelle, le vide

                Le vide existentiel que j’observe autour de moi est énorme. Il est aussi en moi. La façon moderne et actuelle de le combler est avec l’illusion de notre toute puissance et le mensonge du bonheur forcé. Le bonheur est devenu une « illusion nécessaire » selon Boris Cerulnik. C’est une affirmation qui va dans le sens que chaque sourire est un mensonge à soi-même et/ou aux autres. Cela rend la drogue admissible. C’est du bonheur en pastilles ou en injections ou en autre chose. Je remarque une disparition totale du problème de la drogue dans les journeaux, chez les politiques et toutes les discussions officielles. Des gens luttent pour sa libéralisation. Cela va aussi dans le sens que le seul bonheur possible est illusoire. Pour compenser cette perte, la toute puissance vient. À mes yeux, c’est une illusion. Mais elle permet de se croire capable de tout réussir, de tout apprendre, de tout faire. Toutes les voies sont alors ouvertes. C’est la liberté au sens de pouvoir tout faire.
                Cela rend la jeunesse passionnante. Tout est possible. Cela rends aussi le succès et la grandeur obligatoires. Echouer, c’est rater complètement sa vie. Il est interdit de parler d’échec, de mort, de perdant, de maladie, de misère. En parler, c’est évoquer la possibilité d’en être. C’est se distraire du but obligatoire. C’est éveiller la terreur. L’angoisse est là. Elle est infinie. Elle est moteur pour le pire. Ecraser dans ces conditions paraît un moindre mal. Manipuler, jeter, humilier deviennent très vite des activités naturelles. Naturelles car la toute puissance est réservée au vainqueur et seulement au vainqueur. Il faut être un gagnant.

                Par: Didier, le 21.11.2006

                #1713
                Webmaster
                Modérateur

                  À Marie-Joseph,

                  Le bouddhisme est un athéisme. Il n’existe pas de dieu dans cette religion. Tout le monde y est appelé à devenir dieu. Leur grande force est d’accepter cette expérience très forte du vide intérieur et d’en avoir fait quelque chose d’utilisable et de pratique dans la vie de tous les jours. Je les admire pour cela. Je ne serai jamais bouddhiste. Ils ne reconnaissent jamais la personne devant eux. Elle est là. Je tourne la tête. Elle n’est plus là. Je regarde à nouveau devant moi. Elle est là. La personne à côté de moi n’existe que si je la vois. Un bouddhiste est seul. Son but est de devenir vide. C’est pire que seul. Ce vide lui permet d’accueillir tout ce qui vient. Ce vide lui permet de ne pas souffrir une seconde de plus que nécessaire. Il acceptera chaque douleur et la laissera partir à l’instant où elle diminue. Cela donne une très grande capacité à la supporter.
                  Dieu est là. Je tourne la tête. Il est encore là. Je m’enivre et ferme les yeux à cause de mon ivresse. Au réveil, j’ai la gueule de bois et Dieu devant moi. Je me retourne. Il est encore devant moi. Il fait un truc incroyable et mystérieux. Il m’accepte comme je suis. Ce n’est pas une présence terrifiante. C’est plus une personne digne de confiance qui est présente.
                  Il me dérange dans mes bassesses. Il me soutient dans mes faiblesses. Il m’habite dans ma douleur. Sa présence m’affirme dans mon existence. Sa présence me fait continuer. Ce n’est pas une obligation et pourtant c’est obligatoire. Il est aussi un rappel quand j’ai quelque chose à régler. Il donne à ma vie une longueur, une pérennité forte. A cause de Lui, je sais exister.
                  Ce qu’Il me fait, je dois le faire ou je Le perd. Ce qu’Il me fait ne peut m’arriver que si je le fais à d’autres. Comme c’est positif, je souhaite le faire.
                  Je vis un temps de décision, un temps de choix. Je vais vivre ou mourir. Je préfèrerais vivre. Mais je ne suis pas certain d’y arriver. C’est cette faille qui, je crois, me rends ouvert à la présence de Dieu. Dans un sens, cette faille est positive. Je comprends ces réactions incroyables de Kübler Ross et d’Etty Hillesum. C’est aussi un temps d’apprentissage, de découverte, d’évolution, de vie. J’irais même jusqu’à parler d’un temps de bonheur. Ce bonheur ne pourra vivre que si je trouve le moyen de vivre dans ce monde. Je ne suis pas sûr d’y arriver. Je suis en train d’essayer.

                  Par: Didier, le 21.11.2006

                  #1714
                  Webmaster
                  Modérateur

                    Cher Didier, un grand merci pour ton témoignage, j’ai envie de te dire: “ne nous lâche pas”… car tu n’es pas tout seul sur le sentier étroit qui nous mène vers le Royaume annoncé par le Christ qui est un “déjà là” et un “pas encore” à la fois. On y est nous aussi, et bien souvent, on y peine nous aussi. Et puis, la pierre qui porte ton nom, si tu ne la posais pas, pour je ne sais quelle raison ou désespoir, ça ferait un trou, toi seul peux la donner, non loin des nôtres d’ailleurs. Bien taillée, mal taillée, on s’en fout, on donne tout! On y va, avec ce qu’on est, avec le “talent” que Dieu nous offre pour le faire fructifier comme dans la parabole… Courage! À bientôt. Amitié.

                    Par: Michelle Foucault, le 27.11.06

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